A Antalya en Turquie se tient ces 11 et 12 mai 2016 le sommet international des villes contre l'extrémisme. Plus précisément, il s'agit là d'une conférence dans le cadre de l'initiative Strong Cities Network que je vais présenter ici. Et la surprise, c'est que Bordeaux est représentée !
Pour les anglophones, je vous propose de découvrir par avance la plaquette de présentation de Strong Cities Network en suivant ce lien.
"The Strong Cities Network" (en VF "réseau de villes fortes") est un réseau mondial de collectivités locales créé en septembre 2015 à New York, en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, et dont le but est de se réunir dans un projet de construction de la cohésion sociale et la résilience des communautés afin de lutter contre l'extrémisme violent.
Bordeaux n'en fait pas - encore - partie, mais se veut être une cité pionnière en France et même en Europe avec une approche pluridisciplinaire des phénomènes de radicalisation violente, et surtout favorisant la prévention*, sur le modèle du centre de Montréal (lire ci-dessous), lui aussi invité en Turquie.
Et je parle bien évidemment du CAPRI, ou Centre d'action et de prévention contre la radicalisation des individus, lancé en janvier 2016 et ayant pour Secrétaire Général l'adjoint au Maire de Bordeaux à l'égalité et à la citoyenneté, Marik Fétouh. Le CAPRI suit à ce jour 27 cas de personnes radicalisées.
Lire aussi sur le blog: Bordeaux et Montréal ensemble dans la prévention de la radicalisation
Invité du SCN, l'élu bordelais présentait donc au sommet mondial des villes contre l'extrémisme la politique menée à Bordeaux pour prévenir la radicalisation.
Un sommet sous haute protection policière à écouter les dires de Marik Fétouh sur les réseaux sociaux. Pas étonnant quand on se rappelle la place stratégique de la Turquie au cœur des questions de terrorisme, en tant que pays frontalier de la Syrie bien sûr, mais aussi s'agissant du transit des sujets radicalisés entrant ou sortant des territoires contrôlés par l'OEI, comme des réfugiés humanitaires...
Pas une surprise non plus quand on constate que des hauts fonctionnaires, américains notamment, participent au sommet.
Et pour vous retranscrire l'ambiance de travail qui règne durant cette conférence internationale, je me permet de citer les mots de Marik Fétouh:
Un sommet sous haute protection policière à écouter les dires de Marik Fétouh sur les réseaux sociaux. Pas étonnant quand on se rappelle la place stratégique de la Turquie au cœur des questions de terrorisme, en tant que pays frontalier de la Syrie bien sûr, mais aussi s'agissant du transit des sujets radicalisés entrant ou sortant des territoires contrôlés par l'OEI, comme des réfugiés humanitaires...
Pas une surprise non plus quand on constate que des hauts fonctionnaires, américains notamment, participent au sommet.
Et pour vous retranscrire l'ambiance de travail qui règne durant cette conférence internationale, je me permet de citer les mots de Marik Fétouh:
"On constate que tous les pays sur tous les continents sont travaillés par la gestion de la diversité et par la radicalisation. Plusieurs témoignages poignants, dont celui d'un maire africain qui a été kidnappé par Boko Haram. En discutant avec ses geôliers, il s'est aperçu que leur motivation était plus politique que religieuse. Qu'ils vivaient dans la misère, et qu'ils cherchaient une autre société qui pourrait subvenir à leurs besoins. On ne peut pas extrapoler à ce qui se passe dans des pays occidentaux, les leviers sont certainement différents. Mais on ne peut pas nier que dans de nombreux pays, en particulier dans les pays les plus pauvres, il puisse y avoir un lien entre situation économique, fonctionnement démocratique et radicalisation violente. Il nous faut donc investir pleinement l'aide humanitaire et le codévellopement, sans interférer avec les processus démocratiques, qu'en pensant soutenir, les diplomaties occidentales fragilisent parfois."
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Source: compte Facebook de Marik Fétouh |
Alors que certaines cités emblématiques comme Bruxelles, Istanbul, Ouagadougou, Beyrouth... ou bien sûr Paris ont été récemment touchées par de terribles attentats, il est nécessaire de rappeler que les villes ont un rôle démesuré dans le développement de solutions contre la radicalisation violente. De plus, elles sont par nature plus "agiles" et innovantes dans leurs approches que les gouvernements nationaux.
De Mombasa au Kenya où les autorités locales et la police ont élargi la sensibilisation des communautés ciblées par le groupe extrémiste al-Shabaab, à Aarhus, au Danemark, en passant par les villes américaines de Boston, Los Angeles et Minneapolis, de nombreuses initiatives furent lancées ces deux dernières années pour lutter contre la radicalisation, au sein même des communautés vulnérables.
Constatant que de nombreuses villes dans le monde lançaient des initiatives de manière isolée, les initiateurs de Strong Cities Network ont donc décidé que les efforts et les ressources devaient être partagés. Les "bonnes pratiques" en particulier.
Constatant que de nombreuses villes dans le monde lançaient des initiatives de manière isolée, les initiateurs de Strong Cities Network ont donc décidé que les efforts et les ressources devaient être partagés. Les "bonnes pratiques" en particulier.
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Les villes partenaires au lancement en septembre 2015 - source US Departement of State |
De nouveaux membres ont été intégrés depuis: Antwerp (Belgique), Birmingham (UK), Dresden (Allemagne), Kaçanik (Kosovo), Kristiansand (Norvège), Malaga (Espagne), Municipality of Cair (Skopje, Macedoine), Montgomery County (United States), Novi Pazar (Serbie), Peja (Kosovo).
Srong Cities Network compte aussi proposer à ses membres les plus modestes des ressources pour soutenir leurs pratiques en matière de renforcement de la résilience locale à l'extrémisme violent, ainsi que des outils de mesure de l'impact des efforts sur le terrain, comme la réinsertion des profils radicalisés ou l'amélioration de l'engagement avec les communautés vulnérables.
Le réseau lance d'ailleurs une plate-forme en ligne pour partager les bonnes pratiques, des modules de formation et d'autres ressources interactives.
Trois principes fondamentaux guident l'organisation, et je cite là le Secrétaire d'Etat américain John Kerry**:
Le réseau lance d'ailleurs une plate-forme en ligne pour partager les bonnes pratiques, des modules de formation et d'autres ressources interactives.
Trois principes fondamentaux guident l'organisation, et je cite là le Secrétaire d'Etat américain John Kerry**:
- le rôle central accordé à la société civile pour identifier et aborder la façon dont les extrémistes violents recrutent, radicalisent, et mobilisent;
- la nécessité d'adapter la lutte contre l'extrémisme au contexte local (importance de la confiance entre interlocuteurs);
- l'engagement des autorités locales à coordonner étroitement leur action avec les communautés qu'ils aspirent à servir, protéger et représenter.
Pour terminer, et ce n'est sûrement pas un hasard, je rappelle que Bordeaux accueillera le 27 mai un colloque européen en la matière, en présence de Bernard Cazeneuve notamment.
Photos © ZHURNAL.mk
* "La prévention VS la déradicalisation ?" C'est peut-être enfin la bonne solution qui a été choisie par le Premier Ministre Manuel Valls qui annonçait ce lundi 9 mai que chaque région française se doterait d'ici un an d'un centre de prévention contre la radicalisation. Budget total 40 M€.
**Etrangement, on ne trouve aucune documentation française concernant Strong Cities Network, l'essentiel de mes sources pour cet article provenant du Département d'Etat des USA.
**Etrangement, on ne trouve aucune documentation française concernant Strong Cities Network, l'essentiel de mes sources pour cet article provenant du Département d'Etat des USA.