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Quiproquo autour du crash d'un avion du renseignement français à Malte

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La médiasphère défense - puis généraliste - s'est mise en émoi ce lundi après le crash d'un avion vers 7h du matin sur l'aéroport de Malte. A son bord, cinq français: trois "personnels de la défense" et deux opérateurs privés, qui ont malheureusement tous trouvé la mort.

De nombreuses informations contradictoires ayant circulé, faisons le point.

Captures: Youtube, Wikipédia, Twitter.


Il nous faut tout d'abord résumer les faits. Ce lundi 24 octobre aux aurores, un Fairchild SA227 « Merlin IV », immatriculé N577MX, s'écrase après son décollage aux environs de l'aéroport de Luqa, à Malte. L'incident impressionnant est filmé en direct, par un automobiliste notamment.

Les cinq occupants de l'appareil sont tués dans le crash, ce que constatent les secours. La décision est prise de fermer l'aéroport. Il ne rouvrira qu'à midi.

Très vite, des médias ont évoqué un avion luxembourgeois affrété par l'agence européenne de surveillance des frontières "Frontex" pour une mission en Libye. L'Union Européenne, via la responsable de la diplomatie, Federica Mogherini a alors réagi très rapidement en signalant qu' « Aucun responsable de l’UE n'est impliqué dans le crash d’un avion à Malte. Le vol n’était lié à aucune des activités de l’UE ».
A ce stade, les informations venant de Malte font alors état de la mort d'un équipage de douaniers français, mais déjà - et étonnamment - les activités de renseignement sont sous-entendues sur le compte Twitter personnel du Premier Ministre Joseph Muscat...

C'est alors que, plus tard dans la matinée, et contacté par les rédactions françaises, le Ministère de la Défense délivrera à ces dernières un communiqué laconique faisant état de la mort de "cinq français dont trois relèvent du ministère de la Défense, les deux autres étant des contractants privés, dans ce crash aérien dont les circonstances sont encore inconnues". Une enquête a été ouverte.
On ne cite donc ni douaniers, ni agents de renseignement. Cependant, le Ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian confiera à RFI que l'appareil effectuait « des missions de reconnaissance en Méditerranée ».

C'est donc ce qu'on pourrait appeler un cas d'école qui s'est produit hier: un incident touchant un domaine stratégique (celui du renseignement militaire) divulgué par des journalistes ou personnalités étrangères (le Premier Ministre maltais); l'intervention d'un tiers (Union Européenne) devant réfuter son implication; un emballement médiatique en France où quelques protagonistes seulement auront fait appel à des sources fiables; et enfin un communiqué du Ministère français de la Défense à contre courant...


L'externalisation en question


Voici précisément l'appareil qui s'est écrasé ce 24/10, avec 5 français à bord.

Alors DGSE ? Officiellement jamais. Tous les indices laissent cependant l'occasion de le conclure. La société CAE Aviation Luxembourg est un prestataire connu s'agissant des missions ISR françaises en Afrique du nord. Elle a travaillé tant avec la DGSE (/les services secrets), qu'avec la DRM (/le renseignement militaire), ou également l'Union Européenne, ce qui explique la première méprise ce lundi.
De plus, il s'agit d'un type d'entreprise spécialisée, constituée principalement d'anciens membres des services secrets. Ce ne serait donc pas 3, mais 5 membres ou anciens que la DGSE aurait perdu hier.
Le véritable indice demeure surtout le fait que la France n'ait pas communiqué l'identité des victimes. Lorsqu'il s'agit de services secrets, elle ne le fait jamais. La série noire continue donc pour la DGSE:

Sur le blog: La DGSE perd 3 opérateurs clandestins en Libye (Juillet 2016)



Pour en savoir plus, voir cet article de Jean Guisnel pour LePoint.

Et pendant que les médias se ruaient sur la possible révélation de missions d'espionnages en Libye, théâtre dont plus personne n'ignore l'intérêt que la France lui porte, j'aimerais attirer l'attention sur deux articles:


Tous deux rappellent une vérité méconnue, celle de l'externalisation des moyens ISR français (c'est aussi largement pratiqué aux USA, mais pour des raisons plus culturelles que de moyens).
Pour résumer/vulgariser, le Ministère français de la Défense sous-traite des missions stratégiques à des compagnies privées par manque de moyens aériens. JMT le résume bien, "tous les jours, des aéronefs privés décollent avec des militaires à bord. A Dax, Cognac, Pau, mais aussi en opérations. L'exemple le plus connu est celui des locations d'avions équipés par la DGSE, la DRM, le COS."

S'agissant des moyens de renseignements légers, nous en parlions justement sur ce blog au printemps lorsque la France passait commande de deux avions espions. Un programme qui avait pris des années de retard déjà et dont les avions Beechkraft "King Air" ne seront livrés qu'en 2018.

Aussi sur le blog: La France se paye deux avions espions Beechcraft "King Air"





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